dimanche 4 octobre 2009

Andorre-la-mienne -1ère



La visite des églises romanes de Sant Miquel d’Engolasters et de Santa Coloma - préromane celle-là, habitée de la belle statue de Notre Dame du Bon Remède - m’a réconciliée avec l’Andorre. Oui, ce pays ne se résume pas à cette rue, souk sans fin, qu’est la ville d’Andorre La Vieille.
Il existe désormais, je le sais, je l’ai rencontrée, et je le dis avec une certaine fierté, Andorre-la-mienne !

Commençons par l’objet même de ce petit voyage, pèlerinage familial.

A Ordino, visite de l’église. De l’émotion, beaucoup d’émotion.
Les Guilhaume ont forcément connu cet endroit, peut-être alors moins « ripoliné », mais leurs yeux ont vu ce beau retable doré, cette cuve baptismale isolée derrière une grille, splendide dans sa forme à la fois massive et élancée. Quelle matière ? Je ne saurais le dire, cependant la présence des mines de fer de Llorts, à peu de kilomètres, me fait penser à des fonts baptismaux en pierre recouverts d'une planche cloutée .
Ensuite, visite du cimetière. En direction des pistes, à deux pas du centre du village.
Difficile, à première vue, de reconnaître là un «cementiri». De la route, on ne distingue rien d’autre qu’une espèce de grand empilement de terrasses de pierres, de grandes murailles en étages, comme un amphithéâtre, mais à peine arrondi, le tout desservi sur le côté gauche par une sente étroite et très abrupte en pavés (du granit ?).
Cet ensemble épouse la pente assez prononcée, il faudrait s’éloigner pour se rendre mieux compte de l’architecture du lieu. S’éloigner ?…Impossible. Au pied du cimetière est la route, après la route est la rivière, et de l‘autre côté de la rivière s’élève, abrupt, l’autre massif.
Faudrait prendre les airs…
Revenons sur terre.
Et prenons le raidillon empierré pour arriver à hauteur du «premier étage». Là s’étale une grande terrasse, les pavés de pierre qui la carrèlent forment des demi-cercles concentriques.
A gauche, sur un socle, une sculpture de fer rouillé qui pourrait évoquer une croix, mais aussi la proue brisée de quelque ossature métallique : comme le morceau de charpente d’un immeuble inachevé. Le symbole me convient aussi… S’élevant en bordure, plein sud, la muraille est percée de plusieurs ouvertures. Des grilles de métal (avec cadenas !) empêchent toute intrusion, mais permettent au regard d’aller plus loin : une large et longue pièce blanchie s’enfonce sous la montagne et montre, à droite et à gauche, des cavités rectangulaires où reposent, reposeront, ou bien ont reposé, les défunts. Les noms ne sont pas tous catalans, je relève avec un brin d’interrogation amusée, celui d’un officier militaire anglais né en 1914 : que venait-il faire dans cette… principauté ?
A cet endroit, pas de traces des mes ancêtres. Sur un ancien plan cadastral, je constate qu’existait encore au début du XX° siècle un cimetière autour de l’église, comme dans beaucoup d’autres communes. L’urbanisation l’a déplacé, les vivants ont chassé les morts. Il se peut qu’il s’en soit perdu quelques uns en chemin !... Je me contenterai d’humer le souvenir de ces Guilhaume que je n’ai pas connus.
Revenons centre-village. Derrière l’église est une très belle maison en fin de construction. A l’endroit même où, voici cinq ans, je croyais avoir retrouvé la propriété familiale. C’était alors comme une grange abandonnée, en ruines, avec une porte de planches disjointes sur laquelle figurait un écriteau « Perill ».

Faudra faire le deuil d’une hypothétique propriété, nationalité, fiscalité (et que sais-je encore) andorrane !

A ce moment là, me revient en mémoire l’anecdote contée par mon oncle.
Datée du 30 juillet 1935, une carte postale est reçue par la famille restée dans le 34 : « les affaires n’avancent pas fort, mais nous pensons conclure demain ».
Les affaires, c’était la vente des confettis immobiliers qui étaient restés au nom des Guilhaume quand ceux-ci, poussés par les nécessités économiques, avaient quitté les Vallées d’Andorre pour l‘Eldorado héraultais. Exode qui eut lieu aux alentours de 1865 !...
Et les affaires, donc, avancèrent : un pauvre bougre, qui faisait paître son âne derrière l’église, fut sommé d’acquérir la terre sur laquelle le quadrupède prélevait sa pitance sans droit ni titre. L’agriculteur s’exécuta et paya.
Sur le prix de cette vente, le notaire andorran préleva les arriérés des messes pour les défunts de la famille (oui, oui !). Le solde permit à mon oncle et au cousin François de payer leur voyage de retour. Pour avoir travaillé quelques années dans ce milieu, je m’interroge encore sur la validité d’un contrat de vente, en présence réelle de seulement deux vendeurs sur cinq, sans autre procuration…
Mon oncle racontait encore que le tabellion local avait apposé en fin de document, en un seul trait qui n’en finissait pas, comme un gros escargot stylisé : la signature du maître !...Il ajoutait aussi que ce ne fut pas la meilleure affaire de sa vie.
En effet.

Voilà comment, telle Perrette au pot-au–lait, j’ai dû dire au-revoir (adieu ?) à mes rêves andorrans pour le prix de quelques messes, et d’un séjour touristique pour 3ème âge.

Mais, je le sais, je reviendrai à Ordino.

Des livres?
Ceux de M.Verdaguer, pour ceux qui comprennent le catalan!

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