samedi 19 février 2011

Recette d' Aumet


En ce qui concerne la photo, c'est un peu comme la recette du pâté d'alouette que mon oncle synthétisait ainsi: " liste des ingrédients : un cheval, une alouette!" .

Gustativement parlant, c'est pas mal du tout. Et- ce qui ne gâte rien- c'est "locavore" et tout à fait de saison .
Pas trés onéreux non plus. Il suffit de se promener sur nos chemins de campagne, vers Aumet par exemple, et d'y cueillir les nombrils de Vénus qui colonisent les murs de pierres sèches.
Croquants, assaisonnés d'une goutte d'huile de noix (ma préférée ...), ces nombrils accompagnent volontiers des foies de volaille rapidement raidis dans la vieille poële noire de la mémé.

Oui, je sais, les proportions dans l'assiette ne sont pas celles d'un végétarien !...  Mais, tu le sais, de nos jours la photographie n'est pas scientifiquement fiable, trop de trucages!...

Un lundi hors du temps.

C'était un lundi.
La fin de matinée s'est passée dans la salle des Assises du tribunal ... Non, non, je n'étais prévenue de rien!...
Mais la "théâtralité" des lieux est bien une réalité : les acteurs de la justice, de rouge vêtus, et les impétrants tout intimidés au moment de prêter serment. Attentifs aux discours de Monsieur le Premier Président et de Monsieur le Procureur Général, discours qui étaient tout, sauf convenus.
Je me suis sentie réconciliée avec une certaine idée de la Justice, rempart contre l'arbitraire. Merci Messieurs.

En cours d'après-midi, détour par Notre Dame du Dimanche.
- Notre Dame du Dimanche ? Connais pas. Qu'es aco ?
Dans la petite commune de Saint Bauzille de la Sylve, entourant un ancien couvent - aujourd'hui maison de retraite - tu chercheras un large espace avec quelques pins, pas trés bien entretenu mais pas à l'abandon non plus, sur lequel est érigée une petite chapelle toute blanche, entre deux statues de Marie. Au pied du second monument se trouve la tombe, toute blanche et fleurie, d'Auguste Arnaud. Imagine l'endroit accablé sous la chaleur et la poussière de l'été, temps suspendu aux cymbales des cigales ! Voilà le décor de Notre Dame du Dimanche.(... mais nous étions en hiver !)
-Et alors, je répète, pourquoi cette halte, ici?
En 1873, la période est pleine d'inquiétudes, le phylloxéra a atteint la région. Mais pas encore la petite vigne d'Auguste Arnaud. Ce dimanche 8 juin, il travaille dans sa parcelle, souhaitant peut-être conjurer le sort en bichonnant ses ceps. Marie apparaît au vigneron et lui reproche de travailler un dimanche. Elle lui transmet ensuite des "instructions" et lui promet de revenir dans un mois. Le 8 juillet, il y aura foule autour d'Auguste dans sa vigne! Si l'église ne manifeste pas beaucoup d'enthousiasme, les témoignages des présents sont consignés par écrit. "Plus solide que La Salette, aussi solide que Lourdes" écrira un examinateur des faits. Auguste Arnaud toujours plein d'espérance, lui qui disait "je sais où je vais", est mort en 1936 et repose dans son ancienne vigne.

Pourquoi je te raconte tout celà ?
Pour une réflexion de ma fille aînée, sur la modernité du reproche marial au sujet du travail du dimanche.
Thème d'actualité.
Et toi, qu'en penses-tu ?...
- Comme Coluche, "ni pour, ni contre, bien au contraire" .

vendredi 4 février 2011

Lettre gavache

A Paris pendant deux semaines. "Il faut bien des affaires avant qu'on soit logé, qu'on ait trouvé les gens à qui on est adressé, et qu'on se soit pourvu des choses nécessaires qui manquent toutes à la fois." .

C'est pas moi, c'est Rica, ou peut-être Usbek qui le dit .

Mais "mon" quartier général ne fait pas partie de cette ville bâtie en l'air. Non, bien que située en centre-ville, la rue est piétonne, bordée de maisons à trois étages aux façades identiques, chacune colorée  de façon différente. Non, ce quartier ne jouit pas d'un bel embarras, même pas aux heures "de pointe" ... Privilégiée je suis. Merci à celle qui m'a logée.
Qui va me croire? Pendant ces deux semaines, j'ai vu ici beaucoup de choses qui m'ont étonnée.
S'affirmer "de Paris" avait toujours signifié, avec un peu de condescendance, être au "top"... J'ai marché tous les jours, à l'aller, au retour, et aussi à midi vers ma pitance (ma claustrophobie m'interdit les souterrains archi-bondés où courent, volent les autochtones). Marchant d'un bon pas, l'oeil grand ouvert, que de découvertes!.. La modernité a exilé les cuisines au sous-sol des immeubles. La pièce la plus nécessaire, la plus conviviale, la plus familiale, reléguée à un sous-étage!...
Il est vrai, me fais-tu remarquer, que dans notre Midi natal c'est à la déesse "voiture" qu'on a sacrifié les rez-de-chaussée ou de jardin! Les bouteilles "de derrière les fagots" voisinent maintenant avec pneus, outillage ou réservoir de carburant...
Revenons à Paris .
Tous ces gens, l'air absent, qui courent, volent, vers un but connu d'eux seuls, les oreilles reliées entre elles par de curieuses ficelles, noires ou blanches!... Certains circulent sur deux roues, ou bien zigzaguent entre les piétons à l'aide de roulettes sous les pieds, suivant en celà des signes bizarres peints sur les trottoirs, ah oui on dirait qu'il y a écrit quelque chose comme "marche blanche" !
A la brasserie où j'ai élu domicile le temps du repas de midi (enfin, non : il n'y a pas de temps, ce n'est pas un repas, et ce n'est pas à midi pile!) encore des surprises. Mais des bonnes! Les parisiens sont devenus accueillants. Mais si, mais si... Les deux premiers jours, on m'accueille de façon ... commerciale. Rien à dire. Troisième jour, le choix sur l'ardoise indique "Pot au feu d'Aubrac" .... Au jeune homme qui s'enquiert de ma commande, je désigne le plat et commente : "ça me parle!".  L'homme en noir au grand tablier blanc, dans un large et franc sourire répond : "ça s'entend!...". Et à partir de là, tous les jours, j'ai droit au mot de bienvenue, au serrement de main et au journal (-" l'Equipe? - non, merci !"), à quelques mots rapides mais trés aimables, et le dernier jour à une confidence : " la patronne est lozérienne!".
Avant de repartir vers ma province, il me souvient :
" Une femme qui a quitté Paris pour aller passer six mois à la campagne en revient aussi antique que si elle s'y était oubliée trente ans."
Je n'avais pas revu la capitale depuis plus de huit ans. Imaginez l'antiquité que je suis.

Et si on relisait Les Lettres Persanes du trés fin et railleur Montesquieu ?