vendredi 29 janvier 2010

Je m'arrache...

Un texte que j'aime, par un jour gris, loin de là-bas.

" Depuis plus de trente ans je refais ce voyage,
Tous les ans à pareille époque ; et tous les ans,
Le même jour, au même endroit, - sans que ni l’âge
Ni l’amitié, ni l’art aux appels caressants
Aient pu diminuer le regret que je sens,-
Je pleure en quittant mon village.

J’avais cru que le jour où ma vieille maison
N’aurait plus un vivant pour m’en ouvrir la porte,
Mon cœur plus aguerri de saison en saison
Laisserait, au départ, mon âme un peu plus forte ;
Car, en effet, pourquoi pleurer quand il n’importe
Qu’aux morts dormant dans le gazon ?...
Plus que trois jours, plus que deux, un jour, un seul !
Plus qu’une seule nuit, triste et pourtant trop brève,
A passer au foyer, dans le lit de l’aïeul…
Et puisse enfin la voix impérieuse et tendre
De la glèbe natale et du foyer en deuil
Parler plus haut, - si haut, que mon âme, à l’entendre,
En oublie à jamais les chemins de l’orgueil,
Et que j’aille vieillir au soleil sur le seuil
De ma Maison qui doit m’attendre. »

François Fabié (Poète du Rouergue 1846-1928)
Les départs - extraits

Lisez François Fabié, auteur sensible et mélancolique.
Il y a quelques années j'ai pu acquérir le manuscrit de "Pour le Pain", initialement publié dans un recueil à ce jour introuvable -  Les Paysans et la Guerre - 1918 -
C'est une grande émotion de découvrir la naissance d'un poème, les phrases ou les mots rayés, remplacés, longue recherche de l'harmonie pour une oeuvre finale toute ciselée de tendresse. 

vendredi 22 janvier 2010

indice de confiance : 5/5

Aujourd'hui, j'ai quitté ma maison du 34 pour celle du 12 . Rien d'original .

Mais en empruntant la route des Rives, celle qui serpente et suit la ligne de crête de l'Escandorgue, je pense à tous ceux que je viens de laisser derrière moi, dans le pays-bas.
Tous ceux qui m'ont dit "aurevoir" avec un sourire de faux-jeton : elle s'en va " à la montagne", "chez les gavachs", "en Sibérie" etc. On n'a pas l'oeil humide, non, mais peuchère, on la plaint !...
Après le col de la Baraque (610 m et c'est dans l'Hérault!...) je jette régulièrement un rapide coup d'oeil sur le paysage que je vais quitter, ce paysage qui m'accompagne pratiquement jusqu'à l'ancienne ferme d'Engayresque, temple bouddhiste à ce jour . C'est le point de non-retour .


Oui, mais aujourd'hui, avant de photographier le cornet de glace à la pistache, je m'arrête pour regarder une dernière fois les Monts d'Orb. Et là, juste derrière La Coquillade, j'aperçois les Pyrénées enneigées!...

Alors, pour le coup, c'est moi qui vous plains, mes pôvres -z- amis héraultais, vous qui vous activez dans vos jardins.  Quand on voit la chaîne des Pyrénées, c'est la pluie assurée sous trois jours maxi .
Et comme on dit à la télé, indice de confiance 5/5.

Me voici arrivée chez moi, "au-delà du cercle polaire" comme l'a écrit un connaisseur!

Sur mon ordinateur, une copine m'attendait .  Je vous la présente. Elle est là pour annoncer le printemps (à mon bénéfice exclusif).
Indice de confiance 5/5 . Sans barguigner.

Allez bonne fin de semaine et sans rancune!

vendredi 15 janvier 2010

... de mon fenestron



A tous ceux
qui m'ont envoyé leurs voeux,
pour 2010
merci

Que vous offrir en retour ?
la paix
et la santé,
Quelle que soit votre identité.
Et puis, de l'amour
toujours.



mercredi 6 janvier 2010

L'heure mauve .


... J’arrive en haut de la côte de los tascaries. (graphie Segondy!)
Je suis seule au volant, et s’il ne fait pas encore nuit, la pénombre protectrice – celle que j’aime – commence à s’étendre derrière moi et autour de moi.
C’est peu dire que je suis bien !... Je rentre chez moi, tout et tous m’accueillent.

Voici, sur la gauche, la croix de fer toute simple, au début du chemin qui monte jusqu’à la cabane de l’oncle dont le toit est maintenant à ciel ouvert… Guère plus loin, mais à main droite, comme disaient les vieux, l’ancienne vigne de Marguerite. Là aussi une cabane, encore de fière allure, toute carrée au pied du grand pin, en bordure de ce qui fut une belle vigne et qui n‘est plus qu’un espace désolé où rampent les longues bûches de quelques ceps, entre ronces et gafarochs. Lequel des deux, de l’abri ou de l’arbre, console l’autre? A l’entrée de la parcelle, au bord de la route, ils sont toujours là, témoins d’une époque où ils étaient l’un et l’autre indispensables pour protéger le cheval puis le motoculteur, le vigneron ou ses vendangeurs, des intempéries et de la chaleur… Mais peu de gens les voient et moins encore se souviennent de leur vie d’avant… Les souvenirs se bousculent dans ma tête et les larmes ne sont pas loin !...


Voici La Bousquette : comme le franchissement d’un col, avant de plonger dans la vallée où mon village "sur Orb" se prélasse. Vers le nord-ouest, la cuvette est ceinturée, protégée par le Caroux et notre repère : la femme allongée. Il paraît que ce fut – autrefois – un endroit envahi par les eaux. Il est vrai qu’à Piéril, j’ai plusieurs fois trouvé des fossiles marins (trilobites ?).
A l’horizon, les sommets se sont teintés de violet, de cette couleur pareille à la bruyère de Piéril. Ce moment est à moi. C’est l’heure mauve, celle que j’aime, mais hâtons-nous de l’apprécier, car l’heure - ici - ne durera pas 60 minutes!.

J’essaye de deviner des lieux connus, dans ce paysage encore lisible: cette tache claire dans le sombre de la montagne, serait-ce Les Albières? (aquo es pas segur !) Lo castel disait le grand-père, oui, enfin rien à voir avec Chambord ! Il est vrai que je n’y suis jamais allée et que j’avais beaucoup de difficultés à le situer, alors que le papé répétait, insistait, en écartant index et majeur, " là, entre mes deux doigts" … Promis, j’irai un jour voir les Albières, avec mon copain Tom Tom .

De mon village natal, je devine plus que je ne distingue … et ce n’est pas une question de lunettes. Je me repère grâce à la cicatrice laissée par l’ancienne ligne du chemin de fer d’intérêt local.
Je ne vois plus la cheminée de la Tuilerie, Monsieur le Maire l’a fait épointer.
Les cyprès du cimetière, ne forment plus l’arrière-garde, la frontière, entre la partie habitée de la commune et la "zone verte" réservée à la viticulture. Où est-elle, d’ailleurs, la viticulture du village? Des vignes ont été vendues deux fois, me dit-on, une fois à l’arrachage, et une autre fois pour construire.
- Suffit, mauvaise langue!...

Cette tache blanche qui s’étale de plus en plus dans la vallée, ce sont de nouvelles résidences.
Je devine l’Orb et les chaos de Réals. Il y avait là, en aval du Moulin Neuf, près de la vigne de Bonne Poire, deux anciens moulins à vent dont on raconte que l’un fut construit, juste à l’endroit adéquat, pour porter atteinte aux droits de l’autre. Pour lui couper non pas l’herbe sous le pied, mais le vent sous les ailes. Devinez ce qu’il est devenu, le vilain ?... Transformé en résidence secondaire ! Comme quoi, une mauvaise action finit toujours par payer.
- Dis-donc, toi, langue de peilhe! Je t’avais prévenue !
Et d’un geste sec, mamma mia, mon ange gardien - celui qui s’était jusqu’à présent toujours comporté en gentleman - débrancha la connexion …


Des livres ?
J.Amiel : l'Orb
Jean Segondy : Une ancienne châtellenie royale du saint-ponais Cessenon-sur- Orb

Une devinette : connaissez-vous un fleuve du département de l'Aveyron? ...?... C'est l'Orb ! Et oui, il prend sa source au pied du plateau du Guilhaumard... Il est comme moi, de 12 et de 34!

(NB les photos n'ont pas été prises pendant l'heure mauve!)