mardi 25 août 2009

"v" comme vendange... et comme voleur.

Quand n’existaient pas encore ces énormes araignées bleues, hautes sur pattes, qu’on appelle machines à vendanger, les vendanges manuelles étaient pénibles. Il fallait supporter l’onglée du début de matinée, avec de la gelée blanche, le soleil accablant de la mi-journée, et les après-midi qui n’en finissaient pas.
De bons souvenirs, il en reste aussi. La pause du casse-croûte du matin quand les travailleurs espagnols mordaient dans un grand morceau de pain, de flûte (on ne parlait pas alors de baguette!) frotté avec un ail, arrosé d’huile d’olive, garni de tomate, d’oignons, et d’une arencade, le tout composant un assortiment coloré, qui empestait l’haleine du vendangeur, mais qui, ma foi, serait bien à la mode de nos jours, presque du régime crétois. Le grand-père, lui, préférait le pâté «Géo» dont la boite de métal s’ouvrait à l’aide d’une improbable et minuscule clef …
Souvenir aussi que la dégustation gourmande dans quelque vieille vigne, des « raisins bons » dont les ceps avaient été volontairement disséminés, cachés, par le propriétaire lors de la plantation de sa parcelle, parmi les souches à vin. Comme ils étaient appréciés ces raisins oubliés, gorgés de soleil, grains ponctués de taches de rousseur, d’une couleur presque marron tant ils étaient saturés de sucres. Dans la «baraque» en bordure de la parcelle, des raisins pendaient au plafond de bois, suspendus à des fils de fer. Etendage censé défier l’agilité des rongeurs. Lors des travaux d’hiver, le podaire pouvait se nourrir encore au sucre des fruits de sa vigne. Parfois, c’était un chasseur, ou un braconnier solitaire, qui poussait les planches de la vieille porte jamais fermée et prélevait là son dessert, mais parfois aussi les rats avaient dévoré les grains, et seuls des squelettes de grappes pendaient tristement aux fils.
Photo J.C.
Triste, c’est moi qui le fus, le jour où j’ai découvert que devant ma baraque de vigne manquaient à l’appel la grande table et les trois «poufs» qui avaient connu la plupart de nos déjeuners (du matin) et dîners (de midi) pendant les vendanges. Ce n’était pas un vulgaire chercheur de champignons qui avait commis ce larcin, car la salle à manger de plein air était de pierre. La table, d’une bonne vingtaine de centimètres d’épaisseur et de plus d’un mètre de large avait certainement nécessité autre chose qu’un panier en osier pour déménager ! Un voisin suggéra alors quelques «pistes» qui menaient, pour la plupart, à des résidences (principales) du coin… La colère n’est pas bonne conseillère, on le sait. Me vinrent alors des idées de vengeance terrible, de celles qui auraient pu me faire côtoyer les longues robes noires. La préméditation, ça coûte cher d’habitude. Alors, j’ai laissé passer.
Mais si je ne suis pas méchante, je ne suis pas amnésique non plus.
Donc, chers amis, si par une belle soirée d’été, vous êtes invités à prendre l’apéritif autour d’une grande table de pierre, enquerrez-vous donc _innocemment_ du pedigree de ladite table. Et, selon le cas, au rapport, fissa.

1 commentaire:

  1. Je ne voudrais pas être désobligeant mais quand même, parler de gelée blanche au moment des vendanges, non ! Il ne s'agissait que de "banhat" c'est à dire de "mouillé" et en termes poétiques de "rosée", froide au demeurant !

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